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     Ils sont fous tout ce monde-là (5)  Par Di

     

     

     

    La prostituée maudite

     

     

     

    Lilith pensait à sa descendance qu’elle voulait prospère, mais jusque-là, aucun homme n’avait comblé son désir de maternité. Cela la préoccupait beaucoup. Son frère jumeau Noax ne concevait pas non plus malgré sa virilité croissante. Elle avait honte de ne pas procréer et de ne pas laisser de trace de son passage sur Boulderien. Elle se demanda si les hommes n’étaient pas tous stériles.

    Ses voix lui avaient confié un jour que de s’accoupler en se couchant sur l’autre personne était un signe de pouvoir. Elle acceptait de recevoir le plaisir du donneur que si elle était placée au-dessus de lui. Elle ne voulait pas faire de missionnaire. En tant que femme, Première Ministre de Boulderien, elle ne supportait pas de porter le poids d’un homme sur elle. D’ailleurs, elle pensait faire une loi en ce sens, à son retour sur Boulderien.

    Elle posait des questions, mais ses voix ne venaient plus lui répondre. Elles boudaient juste parce qu’un soir elle avait effacé leurs lèvres. Fallait-il vraiment qu’elle se laisse dominer par un homme pour qu’elle puisse recevoir sa semence, porter et nourrir la chair de sa chair ? Dans ce temps-là d’espace-temps, il fallait avoir des couilles énormes pour se prendre pour un homme, quand on était femme et son gène sans-gêne actif de Lilith transmis par son père extra-Boulderien n’était pas pour l’empêcher de le dire.  

     Noax avançait dans ses recherches généalogiques. Il avait réussi à s’infiltrer dans tous les systèmes d’exploitation de l’univers. Il découvrit à la fin que son père était Terrien, qu’il avait une compagne qui avait des enfants et qu’il s’appelait Adam. Il fit un tour d’univers avec son télescope. Quand il zooma au plus loin, il entrevit que le peu d’humains qui vivaient sur cette planète ressemblaient plus à des singes qu’à des hommes. Il démarra le moteur de son OVNI pour aller sur Terre, car il voulait trouver son père et sa mère. Malgré leurs mésententes, il ne voulait pas laisser sa sœur dans l’ignorance et lui écrivit un message sur lequel il lui dit de ne pas le chercher, qu’il partait sur Terre pour toujours. 

     Sachant cela, Lilith fut contrariée et rassembla ses meilleurs conseillers, laissa tenir les guides du gouvernement par un opportuniste. Il n’attendait que ça pour appauvrir davantage les plus démunis. Pour que ses frais soient défrayés, elle prétexta accomplir une mission top secret sur Terre, avec ses conseillers, en mentant effrontément sur les raisons. En réalité, elle voulait trouver avant Noax un lot de terre pour s’y faire construire une résidence secondaire où elle se réfugierait en cas d’attaque ou de guerre. 

    En coiffant et recoiffant ses longs cheveux d’un roux flamboyant, elle attendait son amant du jour dans une pièce baptisée « Lilith », en son honneur. Elle était habillée d’une robe vaporeuse d’un blanc laiteux immaculé bordée de perles blanches qui faisait ressortir son teint bronzé. Son décolleté attirait l’attention immédiate de tout bon connaisseur de formes divines. Elle était belle ! 

    L’amant quotidien n’était jamais le même, car elle avait un goût varié pour les hommes. Un valet se chargeait de trouver les plus beaux pour combler ses moments de détente. Cette fois-ci, il était satisfait de sa trouvaille. Il vint l’aviser que Salmon Cocoquiam était arrivé à la bonne heure et de belle humeur, qu’il avait un cadeau à lui offrir et qu’il était frais et dispos pour elle. Lilith nota sur son carnet que la ponctualité était louable. Ce point valait un bon point. Le valet la conduisit à la suite nommée pour elle « Le plaisir de Lilith » où l’attendait nerveusement l’amant. Le valet ferma la porte et les laissa seuls. 

    Elle déboutonna d’abord les boutons qui attachaient sa robe devant en prononçant : « Et si j’étais papesse d’une religion que je mettrais sur pied avec mon coup d’envoi des plus élégants, m’aimeriez-vous autant que maintenant, ou plus ? Qu’en pensez-vous Salmon ? Il n’entendait rien, subjugué par le corps de Lilith. « Salmon », redit-elle en soulevant la poitrine. « Qu’en pensez-vous ? » Elle savait par ses lectures que la papauté était le plus grand des pouvoirs et que les anges et les saints étaient ses gardiens. Deux boutons seulement retenaient sa poitrine. Elle les défit pendant qu’elle attendait sa réponse et tout à coup sa poitrine explosa hors de sa robe. Il resta émerveillé et ne cessa de la regarder pendant qu’elle enlevait son corset qui lui étranglait la taille, comme celui que portait Barbie-Mère dans sa jeunesse. Il mit ses seins au grand air et les pria d’être bons pour lui. Salmon n’avait d’yeux que pour son corps et la délassait du mieux qu’il pouvait le faire. Elle nota que malgré le fait qu’il s’entêtait à prendre la position du missionnaire qu’elle jugeait contrôlante pour la femme, elle se serait crue dans un lieu sanctifié où les saints sont absents, appelés ailleurs pour aider un adulateur.

    Pendant ce temps, son substitut au gouvernement profita de son absence pour imposer en son nom une taxe extraordinaire afin de payer les sorties extravagantes de son Altesse Lilith, la première ministre. On faisait circuler des rumeurs comme quoi elle recevait des cadeaux ou de l’orfau de ses amants quotidiens, qu’elle n’aimait pas les missionnaires, que c’était une sorcière et qu’elle était sans-gêne. On ne parlait que d’elle, comme si elle était la tentation du serpent, un monstre de mer, une voleuse d’enfants. On la disait cochonne, maudite vache, poule de luxe, souris de partis, la l’oie du diable, la cigogne infertile. On ne l’appelait plus Lilith, on disait « La Prostituée maudite ».

    Ses voix vinrent vers elles en demandant de redessiner leurs lèvres pour qu’elles puissent s’exprimer. Ceci fait, elles lui apprirent tout ce qu’on disait d’elle sur Boulderien. Elle se mit en colère. Tout à coup, elle entendit les pas de Noax qui entrèrent avec fracas dans la chambre, avec une femme. Noax lui présenta sa mère … leur mère, la mère qui leur avait donné la vie et à qui ils devaient d’avoir un nombril.

    Quand elle vit sa mère à côté de son frère, Lilith se fâcha et lui cria : « Mère ! Pourquoi donc nous as-tu abandonnés ? » Noax lui dit d’un ton fâché de se taire et d’écouter attentivement leur maman, car elle parlait un langage un peu différent du leur. Elle avait un accent … 

    « Quand moé vivais su’l Boutte de Rien, j’ai vu homme tomber du ciel. J’ai dit. C’est le souffle du Dieu qui te pousse vers moé ? J’m’appelle Adam, il a dit. II ria quand j’ai dit « mAdame ? ». On a copulé et le « souffle » a poussé nous jusqu’à planète Terre. Arrivés là, on a vu qu’il avait une « promise » qui l’attendait avec un bébé dans les bras. C’était Ève. Elle faisait semblant d’être belle pour séduire mon homme. Moé, chuis devenue « grosse » et fallait cacher ça à Ève. Ça fait que Adam et moé on a accouché sur Boulderien pour cacher nos jumeaux à elle, la maudite Ève. J’ai dit à Adam : « C’est elle ou c’est moé ». Il a dit « C’est elle le jour et c’est moé la nuitte ». Toute ça pour dire que le père Adam a eu des enfants d’elle et de moé itou. La différence entre nos deux espèces est un gène sauteur muté en gène sans-gêne que vous avez tous les deux mes enfants, mais qui est actif que sur Lilith.

    Tout à coup entra dans la chambre Salmon qui avait oublié son chapeau. Quand la mère de Lilith et Noax le vit, elle dit avec colère : « Adam, que fais-tu dans la chambre de notre fille Lilith déguisé en Salmon de Cocoquiam ? » Ève était l’épouse d’Adam, le premier homme sur Terre. Ils étaient le père et la mère biologiques de Lilith et Noax. Adam était le père de Lilith avec qui il enfanta d’autres enfants et le père de Noax qui se maria avec sa demi-sœur de qui il eut des enfants. Des enfants de Lilith se marièrent avec les enfants d’Ève et enfantèrent d’autres enfants.

    « Ah cette Lilith ! C’est la première garce que la Terre a porté et c’est moé qui paie pour ses péchés. »

    Maman ! dit Noah, tu parles de Lilith, ta fille ?

    Et là, comme dans une histoire folle, Adam-Salmon prit la main de Lilith et annonça qu’ils s’étaient vus, connus et reconnus comme étant Dieu et Déesse de toutes les planètes. Ayant toujours des enfants portant le gène sans-gêne actif, elle se tua et hanta les rêves d’Adam pendant 130 ans.

     

     Ils sont fous tout ce monde-là (5)  Par Di

    Fin

     

    Di

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Ils sont fous tout ce monde-là (4)  La campagne électorale (Par Di)

     

     

    Noax ne pouvait pas délier les nœuds dans la corde que Lilith avait attachée autour de ses  poignets, de ses doigts et de ses chevilles. Une souris cachée dans un trou observa la scène et s’approcha de Noax pour mieux examiner la situation, en bougeant son museau pour mieux estimer l’épaisseur de la corde. Satisfaite, elle partit en trottinant et ramena avec elle un gros rat noir qui avait visiblement peur de Noax, mais il avait encore plus peur de la petite souris quand elle agitait ses moustaches. Il rongea la corde au complet et s’enfuit aussitôt derrière un meuble. Noax était libre. Il ouvrit la porte de l’armoire où le bourreau rangeait son petit diner, ouvrit le sac et leur lança des sandwichs au fromage avant de s’évader.

     

    Il marcha longtemps dans la rue en songeant au comportement étrange de Lilith. Quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, sa sœur, poussée par ses voix, s’offensait pour des riens et lui criait des bêtises avec des mots blessants, les uns n’attendaient pas les autres, des mots qui tuent. Que pouvait-elle faire de plus que de le renier et l’enfermer dans un donjon pour ne pas qu’il nuise à ses ambitions démesurées. Pouvait-elle l’assassiner ? Il le craignait. Il sentit qu’il n’arriverait pas à défaire seul ce que Lilith fit de la planète et de ses habitants, pour bien faire. Le grand jeu qu’elle avait inventé en le rendant complice malgré lui, faisait de Boulderien un monde d’égoïstes et créait des injustices.

     

    Il fonda un parti politique avec l’aide d’un groupe de récalcitrants qui n’acceptaient pas les commandements de Lilith et devint chef du parti « Les Indomptables » D’autres se liguèrent avec eux pour faire avancer leur cause : « Retrouver le temps du bon vieux temps », alors que l’égalité et la justice régnaient pour tout et pour tous et que l’orfau n’était qu’un vulgaire matériau hideux qui ne servait à rien. Les Indomptables prirent de l’ampleur. Ils organisèrent des manifestations dans les rues pour dénoncer l’orfau qui ne se trouvait désormais plus que dans les poches des riches contribuables. Noax promettait aux électeurs de retrouver le paradis perdu d’antan. Son programme promettait d’interdire l’orfau et de revenir au bon vieux temps où ils retrouveraient tous leurs droits ancestraux en plus de leur trois besoins fondamentaux et la liberté de penser. Son slogan le disait bien : « Retournons en arrière ».

     

    Voyant cela, Lilith prit des moyens musclés pour faire face à l’opposition du parti de son frère et baptisa le sien : « L’index dit tout ». Son slogan était « L’orfau c’est d’l’argent, c’est pas du vent ». Elle corrompit des êtres purs en les endormant pendant qu’ils absorbaient ce qu’elle racontait et le répétaient comme si c’était des prières à répondre. Ses adeptes n’avaient plus le temps de penser à leur famille car elle les occupa en les faisant travailler bénévolement. Elle gérait leur vie sous l’apparence d’une bonne âme et humiliait ses adversaires en le faisant faire par les autres. Avec des promesses plein les poches, elle leur fit faire des choses qui allaient contre leurs valeurs. Rien qu’en pointant son index vers eux, devenu avec le temps de plus en plus menaçant, ils acquiesçaient à tout ce qu’elle voulait.

     

    Et bien sûr, à l’aide de manœuvres frauduleuses qu’elle s’ingéniait à trouver avec ses larrons, Lilith et ses fidèles admirateurs gagnèrent les élections avec une majorité étonnante. Mais où donc étaient tous ces votants qui voulaient du changement, qui chialaient contre Lilith et son gouvernement autoritaire et austère ? Où donc étaient les partisans qui croyaient en Noax, qui lui faisaient confiance et appuyaient son parti ?

     

    Le lendemain, Lilith confia à ses voix avoir renié son frère de sang qu’elle aimait tant avant. Ses airs de Saint-Nitouche l’irritaient et lui donnaient de l’exéma. Les voix lui conseillèrent de laisser courir de fausses rumeurs sur Noax, histoire de ternir sa réputation et de soulever des doutes sur son intégrité. Lilith lui chercha des faiblesses, un passé suspect, des antécédents marquants ou des faits troublants s’y rapportant. Il n’était quand même pas un ange, sauf qu’elle ne trouva rien. « Bof ! », se dit-elle, « Il n’est rien sans moi. »

     

    Noax fut blessé d’entendre les mensonges qu’elle inventait et faisait circuler sur lui. Il partit vivre dans un village, se construisit une petite maison pour ses besoins et passa beaucoup d’espace-temps à faire des recherches sur ses origines.

     

    Pendant ce temps, Lilith vaquait à ses occupations … et régnait sur tout, mais une chose la préoccupait … 

     

    À suivre …

    Di

     


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    Ils sont fous tout ce monde-là (3) Par Di

     https://youtu.be/cZfDRQ_kKOw

     

     

    Le gouvernement

     

     

    Les voix rappelaient constamment à Lilith qu’elle était née pour régner. Alors, avec l’aide de ses meilleurs pions, elle forma un gouvernement autoritaire pour gérer l’économie planétaire et les fit élire par acclamation. La première loi qu’elle fit voter par ses ministres fous à lier fut d’instaurer des commandements odieux afin de garder le contrôle sur l’âme des Boulderiens.

     

    Bien qu’elle se faisait des ennemis, ses amis fidèles buvaient ses paroles et augmentaient en nombre. Ils la suivaient sur les chemins qu’elle empruntait et répandaient la bonne nouvelle du jour. Craignant pour sa sécurité, elle forma un corps de police et nomma des juges fantoches. Elle fit construire des prisons et on boucla les voleurs et on fit condamner des coupables et parfois des innocents.

     

    Malgré l’admiration qu’il avait pour sa sœur jumelle, Noax ne pouvait plus fermer les yeux sur ses agissements. Il fut obligé d’admettre qu’elle changeait. Sans doute que le gène sans gêne que leur avait transmis leur père était-il trop concentré chez elle et moins chez lui ! Ses valeurs n’étaient plus les mêmes que celles qu’ils avaient reçues de leurs nombreux parents adoptifs envers qui elle n’avait pas de reconnaissance. Son ambition dépassaient les limites, sa soif de pouvoir asséchait son esprit, l’égalité n’était pas sa priorité, c’était « Moi contre tous. » Elle abusait de son pouvoir sur les gens, restreignait la liberté d’expression et les faisait taire sur leurs malheurs en leur parlant de son bonheur. Lilith acceptait de l’orfau sous la table que lui remettaient des bandits à cravate. Les plus beaux hommes étaient à ses pieds pour obtenir des faveurs. Les plus riches l’invitaient et lui offraient des cadeaux onéreux. De plus, elle était jalouse et ne pouvait supporter le regard des hommes sur de belles femmes. Elle évitait son frère pour ne pas avoir à s’expliquer sur ses réactions, mais malgré son trouble, il se devait de faire quelque chose pour éviter que la population ne la mette au pilori ou organise une révolution.

     

    Noax se décida à mettre ses doutes au clair. Il prit rendez-vous avec le « gorille » de Lilith car ce n’était plus possible de la voir sans avoir sa permission. Préoccupé par la transformation de Lilith, Noax n’écouta pas la réponse du gorille et se rendit directement à sa chambre, à l’autre bout du passage. La porte était entr’ouverte, il entra. Par un jeu de miroirs, il vit qu’elle avait réussi par se faire voir par les voix qui n’avaient pas d’yeux, en les dessinant. Elle dessina aussi des oreilles de chaque côté des commissures de leurs lèvres pour qu’elles puissent l’entendre. Il écouta discrètement dans l’antichambre leur conversation.

     

    Il apprit que les voix donnaient à sa sœur des conseils diaboliques pour obtenir plus d’orfau en justifiant des mesures d’austérité, pour tous, sauf pour elle et ses amis les plus près. Elles suggéraient de taxer les biens et services afin d’accroître les revenus de son gouvernement et donc de sa richesse à elle. L’orfau perçu en trop allait directement dans la (BOB), la Banque d’Orfau de Boulderien. Après deux ans d’espace-temps de règne de Lilith, il s’avéra qu’une partie de la classe des pauvres qui recevaient du bien-être social du gouvernement travaillaient au noir et gagnait plus d’orfau que la classe moyenne. La classe moyenne était déstabilisée et ne savait plus sur quel pied danser, s’ils allaient tomber du côté des pauvres ou du côté des riches. Ces gens-là essayaient d’éviter les impôts, tandis que seuls y arrivaient ceux qui avaient les moyens de s’offrir les services d’un fiscaliste pour déjouer les lois.

     

    Noax songea qu’elle était devenu trop sans gêne, faisait des crises pour des niaiseries, et ne supportait pas la contrariété. Les valeurs familiales auxquelles elle avait été était attachée se fondaient dans le décor et prenaient l’bord. Elle changeait, mais pas pour le mieux. Il sortit de sa cachette en claquant des talons et la conjura d’arrêter ses manigances politiques. Les voix s’envolèrent. Elle pointa son index menaçant vers Noax, comme elle le faisait en livrant ses discours ou en donnant des ordres. Il était énervé. Ils se disputèrent et Lilith le mit à la porte.

     

    Noax partit en courant, traversa le pont-levis et se jeta dans les bras de la première venue sur qui il pleura. La demoiselle le rapporta à Lilith et lui demanda une rançon mais elle ne lui en donna pas. Elle fit donner un bain de poivre à Noax par des domestiques pour le punir et menaça de le rendre eunuque. Elle le fit conduire dans une pièce, le fit attacher, lui promettant de revenir lui faire la morale le lendemain. D’un éternuement à l’autre, il constata qu’il était dans la prison du donjon où le bourreau remisait ses outils de travail.

    En sortant de la salle de bain, elle lui dit avec des yeux fâchés qu’elle ne voulait plus le revoir. « Je casse avec toi, faux frère. » 

     

    Mais le lendemain, elle avait rendez-vous aux studios de Télé-Boule pour répondre aux questions des journalistes sur l’état de santé du gouvernement et oublia Noax. Elle prit le micro de Télé-Boule des mains du présentateur de nouvelles qu’elle trouvait niaiseux pour répondre aux questions du public sur la crise que la population vivait actuellement.

     

    Elle expliqua que la planète Boulderien passait par une crise identitaire mystique et que dorénavant ils devaient se battre pour faire valoir leurs droits. Malheureusement l’ère sans-souci qu’ils vécurent depuis des milliers d’années d’espace-temps était terminée. Ils étaient aux débuts d’un temps nouveau où elle amènera la prospérité. Par le pouvoir qui lui était conféré en tant que Première Ministre, en vue des prochaines élections qui auront lieu dans un espace-temps, elle leur promis de garder au programme de son grand jeu, les trois besoins fondamentaux essentiels à la survie, c’est-à-dire un toit pour se loger, des vêtements pour respecter la pudeur et de la nourriture pour ne pas mourir avant l’âge de 120 ans. Et de faire de Boulderien la reine de l’univers. Malgré tout, les Boulderiens voulaient la croire et s’accrochaient à ses promesses. Ils l’applaudirent à se faire des ampoules aux mains, reconnaissants de ne pas tout perdre.

     

    Pendant ce temps, Noax vérifia s’il avait bien ses attributs virils et chercha quelque chose pour rompre ses liens.  

     

     

    À suivre …

     

    Di                   -

     

     


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  • Ils sont fous tout ce monde là (2)

     

     

     

    Le grand jeu

     

    La petite fille naquit la première en ouvrant le passage pour faciliter à son frère le voyage utérin. Les jumeaux étaient les premiers d’une nouvelle lignée d’espèce humaine, portant un gène sauteur en gène sans gêne, transmis par un extra-Boulderien, mais actif seulement sur la fillette.

    Les bébés séjournèrent chez des parents d’accueil, chez l’un et chez l’autre, de saison en saison et de train en train. Ils étaient adorables. À leur adolescence, ils avaient connu l’éducation de centaines de parents adoptifs, tout en faisant le tour de la planète. Malgré la mutation du gène sauteur en sans gêne, physiquement les enfants se développaient comme les autres enfants. La petite Lilith était pourvue d’un fort caractère, d’une résistance à toute épreuve et d’un esprit créateur. Elle avait des aptitudes innées dans les relations publiques. Noax était doué d’une grande intelligence manuelle et d’une force physique exceptionnelle, les sciences étaient son point fort. Elle n’était pas patiente, il l’était. Elle était gourmande, il était gourmet. Ce que l’un n’était pas, l’autre l’avait. On disait d’eux qu’ils ne se ressemblaient pas, mais qu’ils se complétaient.

    C’est à l’âge de 15 ans que Lilith entendit des voix pour la première fois. Elle demanda  qui était dans sa chambre, mais elle ne voyait que deux bouches aux lèvres bien dessinées peintes en rouge, parler d’elle, entr’elles. Les bouches s’installèrent sans gêne, comme si elles étaient au Palais du Commerce et prenaient leurs aises, l’une assise sur le bras d’un fauteuil et l’autre au pied de son lit. Elles disaient que Lilith et Noax avaient une mission à accomplir sur Boulderien, que Lilith était née pour être servie et que son frère Noax était né pour la servir. Elles parlaient de pouvoir, d’argent, de religion et de sexe. Lilith leur demanda de s’identifier, mais elles ne répondirent pas. Toutefois, elle nota les adresses de sites Interboule qu’elles dévoilaient et fit des recherches en attendant que Noax revienne de son voyage spécial dans un court espace-temps. Les voix revenaient tous les jours et disaient toujours que sans Lilith, Boulderien ne serait rien. 

     

    Quand Noax revint, elle lui parla de ces bouches fantômes venant d’un palais qu’elle ne connaissait pas et dont les voix  ne voulaient pas se taire. Le soir même, quand elles entrèrent, Noax fit remarquer à sa sœur que les voix ne pouvaient pas les entendre, car elles n’avaient pas d’oreilles. Elles ne pouvaient pas les voir non plus, puisqu’elles n’avaient pas d’yeux. Mais elles avaient des dents. D’ailleurs, Lilith raconta à son frère qu’un soir, les voix eurent une prise de bec sur un sujet délicat et finirent par se mordre à belles dents.

     

    Ils consultèrent Interboule qui leur fit découvrir la puissance que procurait l’argent sur d’autres mondes et les bienfaits qu’ils offriraient aux Boulderiens, si seulement ils changeaient le monde.

     

    Noax réfléchit à la situation et lui parla de l’orfau, une plante méprisée par les Boulderiens pour son apparence hideuse et pour son inutilité. Elle avait l’aspect d’un vilain bobo infecté par un venin toxique, mais elle était en réalité une richesse inestimable. Malgré sa laideur, cette plante était malléable, élastique, souple et résistante aux manipulations. Noax amena sa sœur à l’orée des bois et lui montra tout cet orfau répandu dans la forêt. Il se pencha pour arracher une racine enfouie à demi dans le sol, cachée par des feuillages et la nettoya avec douceur de ses impuretés à l’aide de ses doigts musclés. Il lui démontra qu’il pouvait transformer cette espèce végétale en pièces d’or de circonférences différentes en les saupoudrant de poudre d’or ou en billets de papier en ajoutant du polymère pour éviter de les froisser. Le plus beau de tout, c’est que l’orfau se reproduisait aussitôt qu’il l’arrachait, comme des mauvaises herbes. Il l’opération en indiquant sur chacun d’eux la valeur désirée. Cela ressemblait à l’argent des Terriens. 

     

    L’idée vint à Lilith d’organiser un grand jeu de société d’envergure planétaire. Un jeu où les joueurs feraient appel à leurs valeurs, à leur bon sens, à leur jugement et seraient placés face au hasard. Le but du jeu était d’amasser le plus d’orfau possible. Les règles étaient simples. Le défi était de faire fructifier la mise qu’ils recevraient par la poste, en économisant ou en le dépensant. Dorénavant, ils devaient payer tout ce qu’ils recevaient en biens et services des uns et des autres. Ils la crurent folle. Mais elle était sympathique et charismatique et de plus elle était connue à cause de son gène sans-gêne hérité de son père.

     

    Noax se mit au travail. Il fabriqua des tonnes d’orfau et les remisa dans une grange qu’il avait construite et qui devint la première Banque d’Orfau de Boulderien (la BOB). Lilith de son côté enclencha une campagne de publicité intense aux postes de télévision et de radio nationaux, Télé Boule et Télé-Boom-Boum. Conseillée par les voix, elle vantait les mérites de son grand jeu éducatif en faisait des lavages de cerveau dans des publicités entre des bouts de romans-savons et des jeux interdits. Séduite par son charisme, la population accepta de jouer les pions. Les citoyens en âge de voter reçurent par la poste des montants égaux d’orfau.

     

    Vendre des biens et services pour recevoir de l’orfau n’était pas une chose simple à faire, car ils étaient habitués à se rendre service, mais les Boulderiens trouvaient le jeu passionnant. Des enflammés se réunissaient une fois par espace-temps pour discuter avec Lilith et Noax. Suite à ces rencontres, Lilith majorait des prix, définissait des marges, ajoutait et retirait des pions, créait des obstacles, des malchances, des chances, cherchait des problèmes à des situations saines et créait des maux sociaux. Noax n’était plus d’accord. Elle poussait le jeu trop loin. Quelques malheureux se retrouvèrent dans la rue, dépendant de la générosité de la population pour manger, se vêtir et avoir un abri les jours de temps bête. Le temps était devenu payant.

     

    Les voix firent des éloges à Son Altesse sur son habileté à manier le public et lui gonflaient le torse. Lilith elle-même se laissa prendre à son propre jeu. Elle y croyait. Le jeu lui-même créa ses propres besoins. Elle chercha des experts en marketing pour répondre à des questions sur tout à partir de rien. L’invention d’un produit, la publicité, la mise en tablette, la vente et finalement, le service après-vente. Il y avait des guerres de prix, on inventa les prix coco, les deux pour un, les rabais, les soldes, les ventes de feu, les ventes finales. La compétition devint normale et nécessaire. Les économes en profitaient pour acheter à bas prix et revendaient à prix élevé pour faire des profits. Les économiseux ramassaient les bouts de savon pour en mouler de nouveaux. Et puis, les économistes expertisaient et faisaient des recommandations, mais ils étaient peu souvent du même avis.  

     

    Les jeunes professionnels demandaient plus d’orfau pour les services rendus, sous prétexte qu’ils consacraient plus d’années à étudier que ceux qui faisaient carrière dans un métier qui demandait moins d’instruction. Les plus vieux voulaient un supplément pour leur expérience. Les Boulderiens se comportaient comme des voisins gonflables qui veulent toujours un plus gros ballon que celui des voisins. Jamais ils ne s’étaient volés entre eux, mais là, ils disaient se faire voler par d’autres. Ils n’avaient plus le temps de se parler car ils devaient gagner leur vie en travaillant à la sueur de leur front. Les relations sexuelles se firent plus rares et des amitiés se perdirent. La démographie fit un bond en arrière. Des classes sociales se démarquaient et on ne parlait plus à n’importe qui, car ils n’étaient plus égaux comme avant, et ils le sentaient dans le regard des autres. Ils s’engueulaient pour défendre des idées contraires, pour tout et pour rien. Ils tramaient des complots avec des mots qui donnaient froid au dos. Les pièces d’orfau perçaient les poches et les nouveaux pauvres réalisèrent qu’ils se faisaient damner le pion. Les gens y pensaient deux fois avant de magasiner quelque chose car ils savaient que l’orfau ne poussait pas dans les arbres.

     

    Dorénavant rien ne pouvait plus être facile.

     

    Di       

     

    À suivre …

     


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  • Découverte de la planète

     

    Adénaïde planait dans son espace, quand elle aperçut une petite planète qu’elle n’avait jamais remarquée dans son éternité. Elle évalua la circonférence et estima qu’elle était trois fois plus petite que celle de la planète Terre. Les mondes de l’espace habités qu’elle avait visités s’étaient presque tous révélés immondes. Là où l’homme était maître, les habitants tuaient Mère nature et la guerre était une activité routinière. Elle devait bien servir à quelque chose, ou à quelqu’un, cette petite boule de rien. Adénaïde se téléporta sur la boule qu’elle appela Boulderien, en l’honneur de rien, et y resta l’espace-temps nécessaire pour voir comment évoluaient les habitants et leur façon de gérer la vie. Pour elle ce temps n’était rien puisqu’elle était immortelle.

     

    Elle chercha des armes, des bombes, des explosifs, mais ne trouva rien pour faire du mal. Pas de cris, pas de sang, pas de violence. La seule chose qui éclatait était la nature peinte de mille et une couleurs et les rires d’enfants venant de toutes les directions de la planète. Donc, pas d’enfants nés pour mourir par la main des hommes. Pas de larmes intarissables versées à cause d’un chagrin sans fond. Pas d’aveux déchirants arrachés par un bourreau sans cœur. Malgré ces preuves tangibles d’absence de barbarie, elle avait peine à croire que cette « boulette » tournait aussi rondement qu’un carrousel à la foire.

     

    En tournant autour de la boule, Adénaïde découvrit que l’argent n’existait pas sur Boulderien. Ce qui pouvait laisser croire que le troc était répandu, mais non, même pas. Les habitants n’avaient rien à eux, mais ils se donnaient tout. Sans condition, sans manipulation, sans fraude ? Son esprit était-il encore sain ou avait-il la berlue ? Ils n’avaient rien parce que « tout » était à tout le monde. Donc, ils n’avaient rien mais ils étaient riches, puisqu’ils se donnaient tout. « Si tout le monde est riche, alors personne n’est pauvre ! » réfléchit Adénaïde. Mais, songea t-elle, à l’inverse, « si tous sont riches, personne ne l’est vraiment car la logique veut que la richesse soit une notion relative, mais non absolue, tout comme la pauvreté. » Donc, tout le monde était riche et tout le monde était pauvre. Il n’y avait pas de grippe-sous, de pleure-misère qui souffrent de ce vice avarié qu’est l’avarice.

     

    Les Boulderiens savaient qu’ils avaient besoin les uns des autres pour vivre en paix.  Les garçons naissaient programmés pour être féministes, ce qui évitait des conflits à gérer entre les sexes et des humiliations à subir par les uns et les unes. Ils avaient les mêmes droits et les mêmes privilèges, mais ils n’avaient pas tous les mêmes intérêts et les mêmes habiletés et aptitudes. Qu’il soit emballeur, masseur ou docteur, aucun des Boulderien n’était supérieur ni moins honorable qu’un autre. Les plus doués étudiaient parfois jusqu’à la retraite ou se recyclaient constamment pour rester compétents dans chacun leur talent et pour devenir des savants. Des moins studieux préféraient étudier moins longtemps pour faire un métier qu’ils aimaient ou apprenaient sur le tas pour aider les autres plus rapidement. Personne ne les jugeait. C’était leur choix. Il n’y aurait pas eu de déshonneur à quêter des miettes, pas plus que d’honneur à manger dans les plus belles assiettes de la planète. Mais nul ne quêtait puisque nul n’était pauvre.

     

    Des stylistes créaient des vêtements superbes, les couturiers les confectionnaient et les ajustaient. Des conseillers-vendeurs-pas-menteurs les aidaient à trouver leur style et à opter pour des couleurs qui les avantageaient, selon les proportions de leur corps, de leur teint et de la couleur de leurs cheveux. Ils accessoirisaient le tout avec des chapeaux, des bijoux, des sacs à main, leur seyant en toutes circonstances. Toutes les dames n’étaient pas si coquettes, mais elles ne voulaient pas avoir l’air craquettes. Ils échangeaient des repas avec des voisins qui restaient plus loin, mais cela permettait aux gourmets et aux gourmands de goûter à la cuisine gastronomique de chefs mieux habilités pour exercer cet art. Que ce soit dans un domaine ou dans un autre, ils s’entraidaient. Cela avait pour effet de développer l’empathie qui manque sur d’autres planètes, car ils savaient comment se mettre à la place des autres.

     

    Dans les pays de Boulderien, les femmes étaient fécondes seulement le 100 du mois de septembre et les enfants naissaient le 100 du mois de juin suivant. Il va sans dire que l’éducation des enfants était une priorité. Pour avoir le droit de créer, les parents potentiels se trouvaient un partenaire un ou deux ans à l’avance. Après la validation de leur inscription, ils recevaient des cours sur la parentalité et ses liens, par des mères émérites. Avant la création de l’enfant, ils passaient une batterie de tests afin de prouver à la société leur capacité à être de bons parents. Les futurs parents étaient invités à transmettre des valeurs familiales dignes de leurs ancêtres. Des partenaires mal préparés ou mal assortis devaient refaire leurs classes ou trouver un partenaire plus approprié. Donc, pas de familles dysfonctionnelles, pas de mauvais traitements, pas de criminalité en vue, et pas de corps de police.

    La sexualité était un loisir qui n’avait rien à voir avec le devoir conjugal. En présence de partenaires sexuels éventuels, des phéromones invisibles, dérivées d’hormones mâles et femelles, captées par le sens olfactif avaient un impact indéniable en agissant sur eux comme la force magnétique d’un aimant pris entre deux amants. Ces hormones servaient de messagères leur indiquant s’ils étaient compatibles entr’eux. Mais étrangement, l’amour avec un « A » majuscule n’existait pas lors de leurs ébats. Cependant ils se respectaient et s’aimaient tous avec un « a » minuscule. Cela permettait de baiser avec qui ils voulaient, sans éprouver de jalousie tricotée par des maux d’amour dont les amoureux souffrent dans les histoires avec un grand « A ». Donc, pas d’éclats de passion, de dépressions, de suicides, de meurtres, pour des peines d’amour qui durent un jour ou toujours.

    Des glandes cérébrales libéraient de l’endorphine dans leur système, dont l’effet procurait un plaisir croissant pendant les vingt dernières années de leur vie, jusqu’à l’âge de 120 ans, sauf exceptions. Par l’action lente de son action, plus les années passaient et plus la mort était désirée. Le jour venu, ils sautaient dans la mort les yeux fermés, où les attendait une explosion orgasmique de toute puissance. Personne ne souhaitait leur départ d’autant plus qu’ils n’avaient pas d’héritage à laisser. Après deux ou trois mois, ils renaissaient en arbre à bisou, en fleur de velours, en caresse de peluche, en boules de rien colorées de couleurs vives. Donc, pas de chicanes déchirantes pour les familles, pas de poursuites légales, pas de profiteur. 

     

    Encore aujourd’hui, après des milliers d’années, une légende raconte que des témoins oculaires avaient vu une Boulderienne disparue depuis un an de temps revenir sur sa planète natale au volant d’un OVNI, enceinte jusqu’aux yeux, accompagnée d’un extra-Boulderien qui leur semblait être le père. La mère accoucha dans la douleur après deux semaines de travaux forcés, d’une fille et d’un garçon. Ils s’assurèrent que les bébés reçoivent le premier lait et repartirent vers l’objet voilant l’identité du père. Ce jour-là, les témoins virent passer dans l’espace l’ombre d’un signe étrange annonçant une ère nouvelle.

     

    Bref, Boulderien était une planète pacifique où les habitants vivaient parfaitement en harmonie. Il n’y avait pas de dictature, pas de gourous, pas de gouvernement. Et pas de Dieu.

     

    À cause de la mutation d’un gène sauteur en gène sans-gêne, tout changea, lentement au début … mais … tout déboula si vite après.

     

    À suivre …

     

    Di

     


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