• 12/ La cérémonie

     

     

    Mariage pluvieux, mariage heureux annonce le dicton et je peux vous affirmer que le chef et sa Lucette, ils seront vachement heureux s'ils se mariaient aujourd'hui : c'est pas des cordes qu'il tombe, c'est des hallebardes par paquet de cent !

    La témouine de la mariée, elle avait pas dû la payer très cher sa "coloration, mise en plis sous chignon à la féline" parce que le temps de sortir de voiture c'était devenu "un buisson filasse à la porc épic en rut" ! Sa robe finette laissait voir ses dessous et c'est là qu'on a su que sa gaine Playtex était rabibochée avec du fil de fer… Certainement que son mari était bricoleur. Bricoleur et radin. 

    Bricoleur, radin et mal fagoté avec son costume boudineur qu'on sentait bien que c'était celui de son mariage ; c'est bien simple, sa chemise faisait des huit au boutonnage et des poils bien gras s'en échappaient pour venir prendre le frais. Pour le bas des pantalons, un bon feu de plancher avait raccourci les ourlets comme ça, le gonze était à la mode. Je ne vous parle pas de la braguette, ça vous filerait la nausée avec effet rétroactif, mais on savait, à la crasse, quels boutons servaient le plus souvent.  

    Comme la mairie était encore fermée et qu'on était à l'heure nous nous sommes tous entassés sous le petit "auvent du temps perdu" comme l'appelle  le maire en faisant référence à la Martine, sa cousine, qui entame toutes ses longues litanies par "Ô vent suspend le temps"

    Encore une cousine de derrière les rideaux.

    Notez qu'il est pas à une connerie près, le maire : accepter de marier par un temps pareil, c'est un appel à la délinquance pour ceusses qui veulent noyer leur chat gris parce que quand on est mouillé, on a froid, quand on a froid on se réchauffe à coup de canons et, à la fin, tout le monde est tellement bourré qu'on se promène en chantant sous la pluie… qui mouille.

    On était tous serrés à se tripoter à paluche-que-veux-tu quand sa majesté communale a bien voulu arriver, bandé de son écharpe pleine de jaune d'œufs parce qu'il venait de faire l'inauguration d'un poulailler pilote : les poules pondaient directement dans une poêle chaude et l'on faisait cuire les œufs sans intermédiaires… L'appellation de ce nouveau concept révolutionnaire  c'est : "Œufs au plat OQD poules"; L'aviculteur économise ainsi le prix du transport des coquilles…

    Ah, on n'arrête pas le progrès.

    Une fois entrés dans la salle des mariages, on a vite vu qu'elle serait trop petite; alors le maire a eu une idée d'ingénu : il a dit. "Je vais poser une devinette et les cinquante premiers à y répondre resteront dans la salle, avec moi ça fera cinquante et un ; les autres attendront sous l'auvent du temps perdu. Alors voyons, voyons… Quelle est la différence entre l'amant et le mari ? Ceux qui trouvent viennent me le dire à l'oreille."

    Grand silence studieux puis les invités viennent sagement chuchoter leur réponse dans l'ouïe du maire qui se fend la poire tout en accordant ou refusant le droit à rester au sec à chaque réponse. Puis ayant ses cinquante gagnants à la sécheresse, il annonce:

    -        Stopppp ! je donne la réponse pour les ceusses qui n'ont pas trouvé : la différence entre l'amant et le mari c'est le jour et la nuit.

    -        Hé, moi j'ai dis c'est le jour et l'ennui, clame la femme du boulanger qui sait de ce qu'est-ce qu'elle parle, c'est bien pareil, non ?

    Manque de pot, la mariée avait bien répondu mais pas le chef qui devait alors se retrouver dehors. Il a donc fait valoir ses droits de prioritaire et a voulu réintégrer le sec mais Abel, le boucher bouché a crié au scandale parce que le chef sortait pas de la cuisine à Jupiter et qu'il avait qu'à se mouiller, ça serait bien la première fois !

    Il aurait pas dû dire ces conneries, le boucher, parce que Nez-de-bœuf, qui l'avait dans le nez depuis longtemps, lui a mis un gauche-droite dans les naseaux. Et le fils du boucher, aussi bouché que son père, a répliqué par une baffe irradiante qui à loupé Nez-de-bœuf, qui s'était baissé, mais elle a cueilli le maraîcher en pleine poire.

    Au bout de quelques secondes de bagarre générale on entendait plus que des "vlans" des "chtacks" et des "wizzz paf" accompagnés de "Tiens connard", de "prend ça dans tes gencives, bourrin" ou de " ramasse tes dents, tête de nœud" !

    Le maire a bien essayé d'appeler la police mais le répondeur du 17 lui a dit que la brigade assistait à un mariage de raison.

    Bref, il a fallu attendre que le combat cesse faute de cons battus mais comme tout le monde était sur le carreau, le maire a pris la décision d'annuler le mariage du chef.

    "On essayera une autre fois, a-t-il déclaré piteusement, un jour où il fera beau".

    C'était la première fois dans le canton qu'un mariage soit disant heureux était annulé parce que trop pluvieux.

     

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Lundi 13 Avril 2015 à 17:56
    Ouf ! le chef l'a échappé belle en ce jour de mariage pluvieux ! Un portrait digne du mariage du siècle. Quel hilarant descriptif de ce mariage à l'eau. J'espère que tu as fait breveter ton invention du concept de l'oeuf au plat OQD poules pour ne pas qu'un fou vienne te voler cette idée géniale de grande économie sur place. Mais qu'est-ce que j'ai ri en te lisant. Pauvres cons battus, K.O.tous sur le carreau, en état de bris d'été en ce jour d'eau vent qui emporte tout. Heureusement que le maire piteux avait gardé toute sa tête à l'abri du déluge de mauvais coups qui pleuvaient de partout. Merci Aganticus dit Marcus pour ce beau mariage mémorable de non lieu. À conserver dans les faits historiques les plus célèbres du canton. :))) Bravo.
    2
    Samedi 9 Mai 2015 à 22:04

    Ben, considérons que c'était une répétition ! Comme ça, le mariage, quand il aura vraiment lieu, ne pourra être que réussi ...

    clown

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